Bribes d'une vie /
/ A la manière des réseaux sociaux
" Facebook, Instagram, Snapchat,...
Avant d’être postée, chaque photo est soigneusement choisie, souvent retouchée et recouverte d’un filtre qui la patinera. Ces beautés virtuelles et multiples sont comme une seconde peau. Un vernis posé sur notre quotidien pour n’en faire ressortir que le meilleur, selon les codes propres à chaque plateforme. L’usage sur Facebook, par exemple, est de créer une succession des moments les plus enviables de notre vie – privée, le plus souvent. Sur Instagram, réseau de partage d’images, on se montre essentiellement derrière un filtre esthétisant.
À chaque photo
son filtre et une nouvelle facette de notre personnalité digitale.
Des
éléments de soi sont testés sur les réseaux et, s’ils sont validés par
la communauté, ils seront intégrés à sa propre représentation. Certaines
personnes y seront par exemple plus vantardes ou plus généreuses que
dans la vraie vie. Finalement, c’est un moyen intéressant de continuer à
se découvrir. Le changement est majeur, car « l’identité n’est plus
une propriété privée de l’individu […], écrit Serge Tisseron dans un article sur l’image de soi et les réseaux sociaux.
Elle est une fiction tributaire des interactions entre un groupe de
personnes, et donc chaque fois différente ».
Même si elle n’est pas le
reflet fidèle de la réalité, cette vie en ligne a une véritable
influence sur notre vie IRL (in real life, « dans la vie réelle
»), comme disent les Anglo-Saxons. « Nous agissons conformément aux
images de nous-mêmes que nous portons en ligne. Ce
n’est pas une comédie, et les conséquences sont immédiates sur notre
comportement, notre personnalité»
Ce flux continu de publications visuelles assorties de smileys, de
commentaires parfois directement insérés dans l’image, comme le propose
l’appli de partage de photos et de vidéos Snapchat, devient une langue à
part entière.
Ce flux de représentations de nous sert bien sûr à être visibles,
mais aussi à communiquer nos émotions, nos états d’âme, à donner des
nouvelles… Le principe d’images
conversationnelles – c’est le phénomène du pic speech (qu’on
pourrait traduire par « parlimage ») – est une pratique courante chez
les adolescents, mais pas seulement. Il est aussi
constitué d’émoticônes, de dessins sur Snapchat, de vidéos et, bien sûr,
de texte. C’est un message où l’image est au premier plan, mais mêlée à
d’autres médias. Poster un selfie, c’est dire « je ».
Nos images sont
en fait une vraie prise de parole, un vecteur de partage."